Le silo
En 1945, avec le bois, j'ai fait construire le silo. Il y avait 4 compartiments : sable, gravier propre, gravier 14/30, et gravier grossier. Sur le silo était monté un tamis à secousses. Georges BARTHEL m'a de nouveau aidé pour l'installation. Martin quitta l'école et Albert revint sans dommages. Nous achetâmes d'occasion notre première camionnette de 2,5 m3 de contenance. La « Reconstruction » avait commencé, et du coup il y avait toujours beaucoup de travail pour nous. Il fallait trouver de nouveaux champs et décaper. Pour ce faire, nous avons donc engagé 2-3 prisonniers de guerre. Nous avons acheté un moteur électrique de 10 CH et un petit concasseur de gravier. Avec les prisonniers, nous avons creusé une cave dans la grange, enclos l'étable de murs sur lesquels nous avons posé une dalle en hourdis. Puis peu à peu nous avons vendu l'excavatrice, les wagonnets et les rails, car nous n'en avions plus besoin.
Directement après la guerre, j'ai dû me débarrasser des vieux chevaux et j'ai acheté un lourd alezan pour
106 000 frcs. C'était une bonne bête, mais nous n'avions pas de chance avec lui, car au bout de 3 ans il
mourut d'une crise cardiaque, par manque de travail. Bien qu'il fût assuré, je n'ai touché que la moitié de sa
valeur. Les prisonniers ont été libérés pour rentrer chez eux. Pour remplacer le cheval, nous avons acheté
un petit tracteur (Ponny) et avions l'occasion pour un TAMBRO. Je réduisais de plus en plus mes travaux
agricoles, pour les arrêter complètement en 1950, car nous avions suffisamment de travail à la gravière.
Tout prend une fois fin et c'était aussi le cas du terrain. Le silo devait être étayé, car toujours mouillé il était
surchargé. Même le mat commençait à pourrir du coté des intempéries. Mon travail à la gravière se faisait dans
le silo. Il consistait à faire passer le matériau par le tamis, à surveiller les moteurs, le concasseur et la pompe
à eau. Tout au long de l'année, je distribuais aussi le sable et le gravier, et chaque fois il me fallait descendre
du silo, puis y remonter : 8 m d'escalier et 4 m d'échelle et cela parfois 20 fois dans la journée.
La gravière de 1952 à 1968
200 m plus loin le long de la rue et à gauche, au Stockmatt, nous avons bientôt pu acheter un grand terrain et y édifier un silo en béton armé, d'une contenance de 200 m3, et comportant 4 compartiments. Nous avons fait fabriquer un tamis vibrant en Sarre et pourvu à l'électrification. Le deuxième camion d'occasion fut muni d'un moteur diesel. Nous avons de nouveau acheté un tracteur PONNY, mais un peu plus puissant, avec, à l'avant, une pelle servant à niveler. Il fait le travail de 6 hommes. Le deuxième mat dont nous avions besoin pour la nouvelle installation a été acheté au Hohwald. Le vieux treuil n'était pas assez puissant, aussi en avons nous installé un bien plus puissant, mais du coup il fallait aussi renforcer le réseau électrique. Avec cela, toujours l'achat de nouveau terrain pour pas mal d'argent.
En 1961 nous avons fait l'acquisition d'un POCLAIN (pelleteuse), et pouvions nous en servir à tout moment pour décaper, et même gagner de l'argent en faisant des travaux extérieurs. En 1962 nous avons remplacé le mat en bois par un pylône métallique. En 1964 nous avons acheté un camion neuf de marque UNIC et en 1967 un camion d'occasion de marque MAN. Il nous fallait une pompe à eau, que nous avons couplée au petit PONNY, ainsi qu'une autre pompe, celle-là à moteur. Par ailleurs, nous avons acheté une petite bétonnière, ce qui nous a permis de faire beaucoup de choses nous-mêmes. Au cours de l'hiver 1966-1967, nous avons construit un grand garage pour y remiser nos camions et machines et avons acheté en dernier, un Chargeur-VOLVO, fin 1967. Moi, j'ai maintenant atteint l'âge de la retraite et j'ai donc transmis l'entreprise à mes deux fils Albert et Martin.
Mes accidents
J'ai déjà parlé de quelques accidents qui me sont arrivés durant ma jeunesse. Je parlerai plus loin de ceux qui
me sont arrivés pendant ma période militaire. De toute ma vie, je n'ai jamais été malade, mais j'ai eu plusieurs accidents. Dans un autre article, je relaterai mon opération, comme soldat, en 1920 à Belfort.
En 1944, nous voulions faire les foins avec la machine. Présents étaient mon frère Joseph et Martin, qui
graissait la machine. Mon voisin Joseph COMTE m'avait donné son alezan aveugle, et moi j'avais mon cheval.
Lors de l'attelage, les chevaux commencèrent à se donner des coups de sabot et à hurler et nous avons dû
les dételer. C'est là que le cheval aveugle me donna un coup de sabot sur le bras gauche. Je crois
qu'autrement c'est Martin qui aurait eu le coup à la tête.
Au bout de quelques jour j'ai eu une forte fièvre, mon bras était enflé et bleu-violet. Nous avons fait venir l
a soeur infirmière qui nous a conseillé d'appeler immédiatement un médecin. Le Dr. BADINA vint et m'emmena
tout de suite à l'hôpital. C'était le mercredi. Le Dr. m'a fait une incision de 25 cm de long. Au bout de trois jours
, le samedi, il fallait procéder à une nouvelle incision, environ 10 cm, mais cette fois sous le bras.
Le soir du même jour, ma femme vint avec Cécile, 3 ans, qu'elle a assise sur le lit à coté. La petite montra
alors sous mon lit en disant : « Maman là il y a du sang ». On a fait venir l'infirmière. Le sang avait traversé
les pansements, l'oreiller et le matelas pour couler sous le lit. Je sentais couler mon sang artériel et serais
sûrement mort exsangue durant la nuit. On m'allongea sur le lit voisin, où je perdis connaissance. On me
ranima avec des piqûres, renouvela mon pansement et je passai une nuit calme. J'étais hospitalisé pendant
12 jours.
La récolte de l'orge commença, et c'est avec un bras bandé que j'ai fauché un peu, et aidé à la batteuse
mécanique. Je voulais monter un quintal d'orge dans le grenier de la maison, mais n'ai pas pu aller au-delà
d'un escalier. Heureusement, Albert était là, en congé.
Jean Paul FASSEL